Le 18 Brumaire de Donald Trump

Publié le 15 Novembre 2016

Le 9 novembre 2016 (18 Brumaire 225 du calendrier révolutionnaire, d'où le titre de l'article), les Etats-Unis ont porté au pouvoir Donald Trump, milliardaire sulfureux n'ayant, fait inédit dans l'histoire américaine, occupé précédemment aucun office civil ou militaire, et ce après une campagne d'une violence sans-précédent qui l'aura vu briser l'establishment de l’un des deux grand parti américain avant de conquérir la présidence malgré l'incrédulité et l'hostilité des médias et des élites.

Si le populisme a toujours fait partie de la politique américaine, la victoire de Trump constitue néanmoins un fait inédit dans le mesure où il est désormais le pouvoir et non plus un aiguillon de la Maison-Blanche, ou de l’opposition comme l’a été le Tea-Party sous Obama.

Il n'est pas sûr d'ailleurs que l'homme lui-même souhaitait vraiment (ou envisageait) sa victoire, un peu à l'image d'un Jean-Marie Le Pen qui aurait gagné en 2002. Reste en tout cas le soutien massif de la working class blanche y compris la majorité des femmes blanches. Chez les minorités, on relèvera tout de même le soutien de près de 30% des hispaniques. Le président Trump pourra-t-il vraiment mettre en œuvre les promesses outrancières du candidat Trump ou se muera-t-il en président réformateur répondant en ce sens au désir d'une grande majorité d'américains ?

Indépendamment de ses intentions, son comportement et sa rhétorique auront exacerbé les tensions idéologiques et raciales aux Etats-Unis et porté à la démocratie américaine un coup très rude. A l'échelle de l'Occident alors que c’est l'Europe qui connaissait le phénomène populiste le plus ancien et le plus virulent, l'extrême-droite tourne désormais, chose d'une ironie extrême, un regard admiratif et plein d'envie... vers la Maison-Blanche (ou du moins jusqu'à la passation de pouvoirs, vers la Trump Tower). Preuve indubitable de ce que les commentateurs appellent « l'européanisation » de la vie politique américaine.

Depuis 1945, les dirigeants européens voyaient dans le président américain leur "suzerain" (sans connotation négative) de fait, ce ne fut jamais sérieusement remis en cause bien que certains, à l'image d'un De Gaulle furent occasionnellement des "vassaux" un peu remuants. Si Trump met en œuvre un isolationnisme pur et dur et se rapproche de la Russie, les Européens devront compter avec une bien moindre protection de l'Oncle Sam et il difficile de voir comment l'UE qui se dépêtre actuellement avec le Brexit pourra gérer de tels problèmes.

Au-delà, c'est le modèle de la démocratie libérale occidentale qui se voulait post-raciale et post-patriarcale qui subit une crise sans précédent depuis 1945. Si le 18ème siècle a vraiment débuté à la mort de Louis XIV, le XIXème à la chute de Napoléon et le XXème sous les balles de Gavrilo Princip, affirmera-t-on un jour que le XXIème a commencé avec l'élection de Donald Trump ?

Il n'est guère besoin de s'étendre sur la période d'incertitude généralisée qui s'annonce des deux côtés de l'Atlantique mais quelque soient ses projets, beaucoup dépendra de la capacité de Trump à faire plier ou non les deux autres branches du pouvoir américain à sa volonté. Il est très possible que l'Amérique s'achemine vers un crise politique et culturelle durable, et son statut de superpuissance en fera alors les frais.

Concluons avec cette citation d'Abraham Lincoln "Si un danger nous guette, je le dis, il ne peut venir que de nous et non de l'étranger... En tant que peuple libre, ou bien nous traverserons les siècles, ou bien nous mourrons de nous être suicidés."

Rédigé par Jean-Manuel Lagier

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